Diplomates sur le discours de Khrouchtchev sur Berlin (1958)

Quatre jours après Nikita KhrouchtchevDans le discours de novembre 1958 sur Berlin-Ouest, l'ambassadeur américain à Moscou a adressé le télégramme suivant au département d'État:

[Moscou, novembre 14ème 1958]

«Lors de notre réunion avec les ambassadeurs britannique et français ce matin à propos du discours de Khrouchtchev, nous sommes convenus de ce qui suit: Nous considérons que [la] raison la plus probable de l'action de Khrouchtchev était la préoccupation concernant [l'affaiblissement] de la situation interne en Allemagne de l'Est, ainsi que le renforcement en particulier en le] champ militaire de l'Allemagne de l'Ouest.

Nous ne sommes pas d'accord avec l'estimation de [l'Ambassadeur d'Allemagne] selon laquelle [le] motif était le désir de Khrouchtchev de renforcer sa position au 21e Congrès du Parti. Nous ne voyons pas qu'il ait besoin de telles tactiques, ni [la] probabilité que cette action renforce en fait sa position…

Nous sommes tous trois déroutés par ce que Khrouchtchev peut s’attendre à accomplir de cette manière. Il est possible qu'il ait pu si mal juger la réaction occidentale qu'il pense pouvoir s'en tirer à bon compte. Nous sommes plus enclins à penser qu'il a une étape ultérieure dans l'esprit, après avoir accumulé une tension extrêmement dangereuse.

Nous pensons qu’une possibilité pourrait être qu’il ait changé son estimation selon laquelle un règlement du problème allemand pourrait être différé indéfiniment et qu’il visait une réunion au sommet, éventuellement sans autre objectif que de traiter de la menace à la paix. J'ai suggéré que cette approche lui permettrait peut-être de contourner l'engagement qu'il a pris sans aucun doute envers les Allemands de l'Est de ne pas discuter du problème allemand sur une base de quatre pouvoirs.

Nous étions généralement d’accord sur le fait qu’un avertissement ferme au gouvernement soviétique est nécessaire et qu’il devrait probablement être émis à titre confidentiel. J'ai exprimé mon opinion personnelle selon laquelle le problème était de savoir s'il fallait ou non indiquer clairement que nous serions prêts à utiliser la force pour maintenir les communications entre le sol, notamment la route. J'ai dit que je regrettais de parler de [reprendre] le pont aérien, car il me semblait que si les Soviétiques pensaient que nous réglerions sur une telle base, ils seraient encouragés à aller de l'avant. Nous serions alors aux prises avec un pont aérien indéfiniment et les Allemands de l'Est seraient alors en mesure de prendre des mesures pour affaiblir ou au moins exercer une forte pression sur Berlin-Ouest. [Je] crois que mes collègues ont été impressionnés par cet argument.

Nous avons également convenu [qu'il] serait souhaitable de réitérer notre volonté de discuter [de] la question allemande sur la base des quatre puissances. Je suggère que cette offre soit faite publiquement, peut-être dans le cadre de la publication [de la] note allemande. Il me semble que le discours de Khrouchtchev rend d'autant plus important que la note allemande soit ferme.

Llewellyn Thompson
Ambassadeur des Etats-Unis en Union Soviétique